LE JOUR OÙ LA CHINE VA GAGNER 2

 Création le 1er avril 2023


Cet article fait suite au premier article du livre de Kishore Mahbubani : « Le jour où la Chine va gagner », sous-titré « La fin de la suprématie américaine ». L’auteur accumule des quantités d’opinions de ses nombreux interlocuteurs, pour prouver le bien-fondé de ses conclusions. Il va de soi que nous lui en laissons la responsabilité. Mais les comportements respectifs des Etats-Unis et de la Chine à l’occasion de la guerre en Ukraine vont un peu, pour un certain temps, à l’encontre de sa démonstration.

*********************************

 


Gengis Khan en Perse

LA CHINE EST-ELLE EXPANSIONNISTE ?

La marine américaine ayant intensifié ses patrouilles au large de la Chine, celle-ci a répondu en militarisant les ilots, où elle avait effectué des travaux de mise en état … Historiquement, la Chine a toujours fait preuve de maladresse pour défendre ses positions. Elle n’a pas fait de conquêtes lointaines, comme les Occidentaux. Ce ne sont pas les moyens qui lui ont manqué : les jonques de plusieurs étages étaient sans pareil. Son comportement défensif vis à vis de ses voisins guerriers de Mongolie commandés par Gengis Khan s’est matérialisé par la création défensive de la Grande Muraille.



Confucius, sage considéré comme le premier « éducateur » de la Chine, est un philosophe chinois né le 28 septembre 551 av. J.-C. Son patronyme est Kong, son prénom Qiu, et son prénom social Zhongni. Il est généralement appelé Kongzi par les Chinois, ce qui signifie « Maître Kong » et a été latinisé en Confucius par les Jésuites. Son enseignement a donné naissance au confucianisme, qui est une voie d'épanouissement humain afin d'être « un homme de bien » et vivre en bonne harmonie avec ses semblables.

Les Chinois ont appris l’art de perdre les guerres avec grâce, pour peu que le voisin victorieux accepte de se plier au rituel consistant à s’excuser auprès de l’empereur chinois d’avoir vaincu son armée ! La Chine ne croit pas être investie de la mission universelle de promouvoir sa civilisation.



Les Chinois sont intrigués par le fait que les États-Unis se sont impliqués dans des conflits onéreux, même si eux-mêmes ont répandu dans le monde leurs pratiques commerciales, ce que les Américains considèrent comme un prélude à une diaspora militaire. La seule exception capable de déclencher une guerre impliquant la Chine est Taiwan, autrefois territoire chinois, qu’elle a été contrainte de céder au Japon en 1895. Il avait été promis que Taiwan serait restituée à la Chine après la première guerre mondiale … Or les États-Unis s’estiment responsables de lutter contre une invasion de Taiwan par la Chine. Mais les relations touristiques entre l’île et le continent sont très nombreuses.

Une autre cause de désaccord sont les manœuvres américaines à la limite des eaux territoriales de la Chine. Est-ce bien raisonnable ?

LES ÉTATS-UNIS PEUVENT-ILS FAIRE DEMI-TOUR ?

La rationalité voudrait que les États-Unis diminuent leurs dépenses militaires excessives, puisqu’une confrontation pacifique avec la Chine est souhaitable. Le déploiement de la marine américaine près des côtes chinoises constituent une provocation. Ironie de l’histoire : Kishore Mahbubani n’a pas prévu que lors de la guerre en Ukraine, les moyens militaires américains seraient déployés en Europe, et non face à la Chine.

La volonté et la possibilité américaines seraient justifiées, pour éviter que leur effacement pousse le monde vers une jungle dominée par la sauvagerie primitive et le chaos. Or le monde n’a jamais été aussi civilisé, et ceci dans tous les domaines. Par conséquent les Américains pourraient tirer parti de ce nouvel environnement en recourant à la diplomatie à l’ancienne, moins chère  que l’option militaire. Malheureusement, les postes américains d’ambassadeur sont attribués à l’aide de critères qui ne sont pas ceux de la valeur personnelle face à leur nouvelle situation. L’administration américaine classe au second plan la possibilité de négocier des compromis.  Or l’Histoire enseigne qu’un échec peut survenir précisément quand on se montre incapable de penser l’échec.

Primo : Les États-Unis sont en concurrence non pas avec un parti politique, mais avec une culture ancienne.
Secundo : Les qualités intellectuelles des décideurs chinois ne sont pas reconnues à leur juste valeur.
Tertio : La Chine développe à grande échelle une technologie de pointe.
Quarto : le pouvoir américain n’est pas démocratique.
Quinto : l’Amérique n’inspire plus le reste de l’humanité.

LA CHINE DOIT-ELLE DEVENIR DÉMOCRATIQUE ?

La limitation du nombre de mandats présidentiels a été supprimée en Chine. Au cours des deux mille dernières années, la Chine n’a pas bénéficié de l’influence des jeunes générations. Or la crainte des dirigeants est de subir le chaos, et/ou de faciliter la corruption. Leur souhait est d’attirer les meilleurs volontaires au sein du parti. La qualité des diplomates chinois s’améliore donc constamment. Plus la Chine devient puissante, moins elle n’a besoin de s’ingérer dans les affaires des autres pays. Lorsqu’elle regarde son sort, elle ne le compare pas à celui des nations occidentales, mais à ce qu’elle a subi dans le passé, comme les grandes famines. Le tourisme chinois à l’étranger se développe considérablement.

L’amélioration des conditions de vie de la population chinoise, et la restauration de la Chine comme grande puissance, sont des objectifs atteints de manière spectaculaire. D’ici une ou deux décennies, l’économie de la Chine dépassera celle des États-Unis. C’est un contrat social entre le peuple et ses dirigeants, tout en ne disposant que d’une marge d’erreur réduite, en suivant sa propre voie dans son rêve d’une « renaissance nationale », pour une population de un milliard trois cent millions d’habitants.

L’exportation de la démocratie en Chine lui est-elle favorable ? Les dirigeants chinois pensent que si les États-Unis essaient de promouvoir la démocratie en Chine, ce n’est pas pour la fortifier, mais plutôt pour y susciter la désunion, et finalement le chaos. Xi Jinping pourrait être un « roi philosophe ». Son principal défi consistera à s’assurer que la Chine reste stable et prospère après son départ.

LE POSTULAT DE LA VERTU

Le plus grand obstacle à l’amélioration des relations entre les États-Unis et la Chine vient d’une construction mentale puissante mais invisible : le postulat de la vertu : de nombreux Américains pensent que leur pays est le plus grand pays qui soit. Or l’idée d’une Amérique parfaitement vertueuse est fausse … Effectivement il a existé une période où le monde entier enviait l’Amérique. Mais le revenu des plus pauvres a stagné, voire diminué. Une aristocratie fortunée utilise son argent pour faire adopter des décisions politiques et sociales. Les décisions du Congrès sont déterminées non par les électeurs, mais par les donateurs. Il existe des lobbies, comme celui des armes à feu. Il s’est créé une aristocratie financière.

Si l’affrontement entre les États-Unis et la Chine oppose une démocratie saine et souple à un système communiste rigide et intraitable, les États-Unis l’emporteront. À l’inverse, s’il met en présence une ploutocratie rigide et intraitable et un système politique méritocratie sain et souple, la Chine gagnera.

La suite et fin au prochain article