VINGT SNOBS CHEZ MAO

 


Création le 29 décembre 2020

Vingt "snobs" au pays de la révolution culturelle et des intellectuels en bleu de chauffe ! Colette Modiano nous raconte ici avec beaucoup de verve et de brio son voyage en Chine avec vingt personnages de la «jet society» qui s'attendaient à visiter le pays de Mao comme ils auraient pu le faire de la Thaïlande ou de Bali. Qu'on imagine un marquis italien, l'épouse d'un industriel milanais, un propriétaire de galerie d'art, la veuve d'un directeur de journal, une comtesse bien connue du Tout-Paris, un banquier péruvien, un général irascible, se retrouvant devant le délégué d'une usine, qui vante la victoire prolétarienne ou la sagesse du Petit Livre Rouge, alors que tous ces gens ne rêvent que d'antiquaires à dévaliser, d'hôtels modernes et de bains chauds !

Il y a de quoi « sourire jaune ». C’est donc avec un petit sourire que Colette Modiano, l’accompagnatrice, a publié son livre en 1973, après deux ans de négociations, un an de préparation ,quatre jours de voyage chaotique en avion … et un mois de croisière la plus chère du tourisme mondial de l’époque.

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C’est d’abord le survol de la Sibérie en Tupolev, avec les avatars habituels : l’avion ne redécolle pas à cause du brouillard à Irkoust … Première vague de protestation de la  troupe des « super-touristes » qui ont payé le prix fort pour un voyage qu'ils croyaient sans histoires.

Super accueil de bienvenue, on se secoue les mains, les yeux dans les yeux en disant « Shie, Shie » (« Merci, Merci »), et « Kampei » à l’amitié franco-chinoise. Puis on passe à  table, avec les bols de riz finaux, que la courtoisie interdit de toucher,  car cela signifierait que la profusion des mets servis n’a pas été suffisante …

 


À l'heure de la sortie des bureaux et des ateliers, la foule est dense. Les femmes sont toutes vêtues  dui pantalon de toile bleu uniforme,  et d'une veste grisâtre matelassée. 

 


Les hommes sont habillés de même. Ils portent tous la même casquette molle qui les rend méconnaissables. La rue est très propre : pas un vieux papier, pas une pelure de fruit. Les marchands d'antiquité ne sont pas autorisés à vendre des objets de plus de cent ans d'âge. Dans les restaurants, le moment solennel est l'arrivée du canard laqué qu'on montre, et qu'on rapporte découpé..

La philatélie est un raccourci de la vie chinoise : fleurs, papillons, travail en usine, construction de barrage : il n'y a pas de colle au verso des timbres, on plonge un petit pinceau dans un flacon de colle liquide. Les prix sont calculés sur un boulier à billes de bois. Les étudiants passent leurs vacances annuelles aux champs ou à l'usine. On a même  pu voir Mao lui-même jeter un ou deux cailloux sur l'emplacement d'un barrage..

 La petite troupe poursuit ses pérégrinations. Le problème avec les guides est de savoir ce qui est interdit de voir ou non, et pourquoi. Personne ne le sait trop, y compris les guides et tout se termine par des protestations d'amitié franco-chinoise. 

 Puis c'est le voyage en train. La campagne est très pauvre. Quelques rares cultures sur un flanc  de colline. Les pâturages sont un luxe que les Chinois ne peuvent pas se permettre. Pas d'élevages, mais aussi pas de chiens. Les Occidentaux affirment qu'ils ont été mangés au cours des grandes famines de 1946 quand des millons de personnes moururent de faim. Quand on parle de la disparition des chiens, les Chinois s'indignent ou éludent. Mais il faut dire aussi que dans la Chine nouvelle, les mouches ont été pratiquement éliminées.

Dans le wagon restaurant, on sert un très convenable repas chinois, tout en s'excusant de l'indignité des mets qu'on offre ... Tout est propre et sans odeurs : la propreté est un devoir national.  

 

 

Loyang. Les Bouddhas datent de la fameuse époque Han, qui, pendant 400 ans fut à l'art chinois ce que l'art gréco-romain fut à la civilisation occidentale. 

La petite troupe s'arrête dans le vieux Loyang. La foule se presse autour d'elle, L'un des touristes applaudit, et bientôt il est entouré d'un cercle sonore d'applaudissements sans fin. pour ces amis de la Chine qui viennent de "Fago" (la France). La troupe se divise en deux groupes : l'un va visiter une usine de roulements à billes, l'autre une école, dont la directrice est très sympathique.

 

Les excursions se terminent par une visite à Hang-Tcheou, une station thermale. Après avoir bu  du thé du "Puits du Dragon", le plus fameux de Chine, c'est la visite d'une école modèle, puis la rencontre d'un viel homme portant un sceau de fumier de porc. L'engrais naturel a toujours été une des richesses de la Chine : c'est "l'or marron".

Vient enfin le moment du départ. Les douaniers font leur travail plus que consciencieusement, flairant une bonne affaire. Les excédents de bagages du groupe sont énormes. Ils partiront par train, à un coût très mnime.