LE POUVOIR DE LA COLÈRE 3


Quelques secondes avant l'assassinat de Gandhi

Création le 15 février 2018
 

9 - LES CINQ PILIERS DE LA NON VIOLENCE

Peut-être Gandhi est-il allé un peu trop loin dans la simplification de ses repas quotidiens, mais il avait l’habitude de dire « Je mange pour vivre et je ne vis pas pour manger ». Mais il parait que dans sa jeunesse, il aimait beaucoup manger. Au fil des ans, il s’est convaincu que si l’on est capable de vivre simplement, on peut aider les autres simplement à vivre. Nous réagissons mieux à des incitations positives qu’à des incitations négatives.

Certains des historiens les plus sagaces ont souligné qu’il était avant tout un négociateur, qu’il savait s’intéresser aux divers points de vue de ses interlocuteurs, quitte à passer à la  vitesse supérieure si la négociation ne menait à rien. Il voyait bien que pour diriger les peuples, les gouvernements et les religions s’appuient souvent sur la peur.


Il vivait en respectant les cinq piliers de la non-violence :
- Le respect ;
- La compréhension ;
- L’acceptation ;
- L’appréciation ;
- La compassion.

Une anecdote : invité par le gouvernement britannique pour les dernières négociations sur l’avenir de l’Inde, on voulait le loger dans un quartier chic, lui qui était vêtu de  son habit traditionnel indien en lin tissé. Il avait préférer demeurer parmi les ouvriers du textile, alors que ceux-ci avaient été pénalisés par sa volonté de laisser le coton être filé en Inde. Devant la consternation des hauts fonctionnaires britanniques qui craignaient le pire, il avait répondu que c’était un bon moyen pour leur expliquer le point de vue du peuple indien. Finalement, non seulement les ouvriers ont écouté Gandhi avec respect, mais il a recueilli leur approbation.

Quand Gandhi prenait la parole lors de prières ou devant de grandes assemblées, il conseillait vivement aux hommes de cesser d’asservir les femmes et de les traiter comme des esclaves. Il encourageait aussi les femmes à rejeter le mythe selon lequel elles n’avaient pas de volonté et devaient être protégées. La libération des femmes et des castes les plus basses ne pouvait pas attendre.

Il avait raison quand il disait que la première étape de toute libération devait venir de l’intérieur.

10 - VOUS SEREZ MIS À L’ÉPREUVE

L’objectif de Gandhi était celui d’un pays uni où tous les gens de toutes castes et de toutes confessions pourraient vivre ensemble en harmonie. Or cette vision-là était écartée chaque fois qu’elle était remise sur le tapis. Muhammad Ali Jinnah, un des chefs du mouvement musulman séparatiste, voulait la création d’un « Pakistan » (pays des purs). Gandhi, dans un esprit de conciliation a proposé à Lord Mountbatten, le dernier Vice-roi d’Inde, que Jinnah devienne le premier Premier ministre de l’Inde indépendante. Stupéfaction de son interlocuteur.

Conclusion : il y a eu ségrégation et d’immenses massacres dans les populations en fuite. À Calcutta, Gandhi a demandé que lui et le chef de la Ligue musulmane dorment sous le même toit. La population a rapidement compris la leçon et est devenue enthousiaste, là où l’armée avait échoué à rétablir l’ordre. Le nouveau Premier ministre a déclaré : « S’il y a bien une personne à remercier aujourd’hui, c’est Gandhiji !" (en hindi le suffixe ji est une marque de profond respect. C’est la même que l’on retrouve à la fin du mot « Bapuji »).

À la suite de toutes les violences qui ont quand même envahi le pays, les parents d’Arun ont décidé de rentrer en Afrique du Sud, dans des conditions plus confortables. Coup de tonnerre : Gandhi vient d’être assassiné. Il avait échappé à beaucoup de tentatives, souvent perpétrées par des Hindous d’extrême droite …

Les funérailles ne pouvaient pas être repoussées, en raison de l’immense rassemblement qui croissait d’heure en heure. L’hommage le plus frappant est le fait que les violences en Inde ont pris fin de manière soudaine.

Ensuite Arun est allé vivre aux États-Unis. (Une de leurs spécialités est la fusillade dans les écoles). En 1999, quinze étudiants sont morts dans un lycée du Colorado.

On lui a demandé de venir discuter avec les survivants. Il a répondu qu’il parlerait du pardon et du fait de continuer à vivre … Au lieu de se faire jeter de l’amphithéatre, il a eu le droit à une « standing ovation » !

11 - LEÇONS POUR AUJOURD’HUI


Gandhi a été assassiné par quelqu’un qui réfutait qu’il y a quelque chose de bon à prendre dans chaque religion : « Quelle importance que nous empruntions de chemins différents, du moment que nous atteignons le même objectif ? ». Arun ajoute que cette philosophie est de celles qui construisent des ponts entre les êtres, et que la paix et l’espoir peuvent s’épanouir quand nous nous ouvrons aux autres.

Souvent on lui demande : « Qu’est-ce que Gandhi ferait contre le terrorisme ? ». Il répond qu’en ce qui concerne les Américains, il aurait appelé à une politique étrangère s’appuyant sur la compassion plutôt que sur l’avidité ! Que le véritable changement n’a lieu que lorsque les individus comprennent le mal que peuvent causer les préjugés. Que ceux qui cherchent le changement à travers l’éducation donnent de l’espoir à tous …

Arun rappelle que notre monde traîne derrière lui une longue histoire de violence, d’agressions et de guerres entre différents groupes. Des millions de vies ont été sacrifiées à la violence, et d’autres ont souffert des atrocités dont s’accompagnent le repli sur soi et la haine.


Lettre à Hitler

12 - ÉPILOGUE - LA JOIE LA PLUS GRANDE

Quand le Premier Ministre David Cameron a inauguré la statue de Gandhi à Londres, il l’a décrit comme étant l’une des figures majeures de l’histoire politique.

Curieux comportement d’étudiants ghanéens qui ont détruit une autre statue de Gandhi … Mais les dirigeants africains ont célébré Gandhi comme l’une des personnalités les plus remarquables du XXème siècle.

Les Écritures d’à peu près de toutes les religions font l’apologie de l’amour et du respect de son prochain. Pourtant, beaucoup de gens ne croient que ce qui les arrange. Il reste donc beaucoup à faire.





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La Presse de Nouvelle-Delhi : Gandhi était sorti du Palais Birla, où il jouissait de l'hospitalité d'un riche industriel hindou et effectuait son jeûne de protestation contre le conflit indo-musulman. Il allait faire sa prière sur les gazons du palais, marchant péniblement en s'appuyant sur les épaules de ses petites-filles ; une foule de 500 personnes s'ouvrait respectueusement sur son passage, lorsqu'un jeune homme vêtu d'une capote kaki de l'armée s'avança et décocha au mahatma 4 coups de revolver en pleine poitrine. Dès le premier coup de feu, une tache de sang rouge apparut sur sa cape blanche ; au troisième, il offrit lui-même sa poitrine toute grande, et chancela dans les bras des femmes qui poussaient des cris et éclataient en sanglots. Transporté à l'hôpital, il rendit l'âme au bout d'une demi-heure.

Maîtrisé par des assistants, l'assassin a déclaré à la police qu'il était un Hindou Mahratte de Poona, et qu'il était indigné de la modération de Gandhi à l'égard des musulmans.

"Remercions le ciel, a dit une personnalité officielle anglaise des Indes, que l'assassin ne soit pas un musulman, sinon le pire serait à craindre".

En effet, Gandhi se préparait, à l'issue de son jeûne, à entreprendre au Pakistan musulman une grande tournée de prédication et de pacification. On sait que les deux Dominions créés le 15 août dernier, Inde et Pakistan, sont déchirés depuis cette date par des troubles et des bagarres, surtout du fait que le Cachemire, de population en majorité musulmane, a été attribué au Dominion de l'Inde.

Gandhi ne cessait d'exhorter les Hindous à fraterniser avec les Musulmans, à leur rendre l'usage des mosquées qui avaient été converties en temples bouddhistes, à leur assurer garantie et sécurité dans les trains, sur les routes et dans leurs demeures. Il avait entrepris son jeûne comme un symbole d'auto-punition et blâmait énergiquement l'emploi de la violence pour résoudre le problème des relations indo-musulmanes. - « Le jeûne, disait-il, m'est apparu comme l'effort le plus noble de la nature humaine, et la meilleure discipline pour parvenir à la nudité de la conscience ».