90 ANS D'AMITIE FRANCO_AFGHANE 5

Création le 12 juillet 2013

Comme de bien entendu, cet article fait suite au précédent.

TABLEAU 28 - Le COFA, une initiative des ONG ( organisations non gouvernementales ) françaises ( intervention de Guy Causse - Collectif des ONG françaises en Afghanistan )


L'Union fait la force. C'est ce qu'ont compris une grande partie des ONG françaises travaillant en Afghanistan, réunies en un collectif : le COFA. Les dix-huit ONG françaises sont présentes dans tous les domaines d'intervention humanitaire sur 28 des 34 provinces afghanes, particulièrement dans  les domaines du développement, de l'éducation, de la Justice, de la santé, de l'agriculture et du développement rural. Ces actions sont mises en œuvre par plus de 3 000 Afghans, aidés par moins de 100 expatriés.

Le budget annuel des ONG françaises est de l'ordre de 50 millions d'euros, dont la part d'aide du gouvernement français est de l'ordre du dixième. Il est à noter que dans un pays en situation de guerre comme l'Afghanistan, l'aide humanitaire ne représente que 10% des dépenses militaires engagée dans le pays.



 Depuis de nombreuses années, le COFA organise et soutient des conférences et des colloques pour dire les souffrances du peuple afghan en ces trente années de guerre et orienter les actions vers la promotion de la société civile.


TABLEAU 29 - Relations économiques récentes franco-afghanes ( intervention de Vincent Schneiter, ancien attaché commercial de l'Ambassade de France en Afghanistan )


Les exportations françaises vers l'Afghanistan sont dix fois supérieures aux importations. les principales ventes sont les verres creux, les plats préparés, les instruments et appareils de mesure et de navigation, les pièces détachées pour automobiles. A l'importation, il s'agit de quelques produits agricoles et d'artisanat. Il s'agit d'un marché difficile d'accès : infrastructures déficientes, transit lent et coûteux, insécurité, corruption.

Le potentiel minier est important ( charbon, fer, cuivre, lithium, béryllium, or, niobium ). Six autres secteurs semblent prometteurs : raffinage de pétrole, cimenteries, traitement de l'eau, secteur agricole, infrastructures, production d'électricité. Toute entreprise peut prendre contact avec le GIE Acces, basé à Strasbourg ( 3 quai Kléber 67000 Strasbourg ).

L'Agence française de développement ( AFD ) agit sous forme de subventions de microcrédits et d'aide aux ONG; PROPARCO, branche de l'AFD est dédié au financement du secteur privé.

Selon le rapport de Madame Hostalier, député du Nord, il pourrait y avoir environ 130 entreprises françaises potentiellement intéressées par le marché afghan. Pour donner une meilleure visibilité de l'Afghanistan en France, on projette la création d'un Club France-Afghanistan regroupant des responsables d'entreprises susceptibles d'être intéressées par le marché afghan. Ce n'est pas une tâche facile, tant, au premier abord les indicateurs semblent négatifs. Ce sont les entreprises déjà implantées dans la région qu'il faudrait cibler en priorité.

Le traité d'amitié et de coopération signé le 27 janvier 2012 prévoit des avancées dans l'agriculture, les infrastructures, l'industrie et le commerce.



TABLEAU 30 - L'Institut français d'Afghanistan ( intervention d'Olivier Huynh-Van, attaché de coopération à l'Ambassade de France en Afghanistan )


Rénové et inauguré le 20 septembre 2010, le "Centre culturel français" fait peau neuve. Une médiathèque, un théâtre extérieur et un auditorium fournissent un équipement de qualité. Certaines manifestations font salle comble, voire refusent du public. Musique classique ou musique traditionnelle afghane sont très appréciées. de même que les pièces de théâtre. C'est aussi une tribune audiovisuelle pour nombre de partenaires afghans : la Fondation Armanshar organise des débats avec la société civile. Le ministère de l'Education nationale organise des conférences pour ses cadres.

Mais la possibilité est également à l'étude de diffuser des manifestations à Hérat et à Mazar-e-Charif.



TABLEAU 31 - L'audiovisuel ( intervention d'André de Margerie, directeur des relations internationales d'Arte )

Depuis 2001, la coopération franco-afghane a porté sur la rénovation ou la fourniture d'équipements audiovisuels, sur la production de films, ainsi que sur la restauration d'archives :

- Inauguration du cinéma Ariana en juin 2004 par les ministres de la Culture des deux pays. Aujourd'hui, ce cinéma ne programme plus de films européens. Il est entièrement retourné à une programmation de films indiens et américains !
- Modernisation de l'Auditorium du lycée Esteqlâl ;
- Création d'un atelier de formation au cinéma documentaire : l'atelier Varan de Kaboul ;
- Sauvegarde et numérisation de d'archives audiovisuelles afghanes par l'Institut National de l'Audiovisuel ( INA ) ;
- Festival documentaire au Centre Culturel Français.

Il est heureux que le Programme de coopération franco-afghane signé en 2012 fasse mention de coopération dans le domaine de la formation audiovisuelle.



TABLEAU 32 - L'action de la DAFA et le patrimoine culturel afghan ( intervention de Philippe Marquis, directeur de la DAFA )


Pendant vingt ans, la présence archéologique française en Afghanistan avait été suspendue. La destruction des Bouddahs de Bâmyân, en mars 2001, a montré soudainement au monde entier l'aspect tragique de la situation des monuments historiques afghans et de leur archéologie. Les monuments historiques et le Musée national sont dans un état d'abandon à peu près total. Les sites archéologiques, eux, ont été quasiment pillés et continuent à l'être.

La condition posée par la DAFA pour la reprise des fouilles à Bactres était la cessation des pillages du site : les communautés associées aux fouilles en sont désormais les meilleurs gardiens. Plus d'une centaine de villageois ont été embauchés, et parallèlement une école a été créée. Mais les Afghans ont également eux-mêmes conduit des fouilles à Bâmiyân et à Tepe Nârandji.


A titre exemplaire, un projet de construction conçu par le Ministère de la Défense et les forces de coalition a été ajourné, suite à l'évaluation archéologique du site.

La plus grande opération d'archéologie préventive est celle de Mes Aynak, un gigantesque chantier à la richesse considérable mobilisant plus de six cent personnes. Mais des monuments comme le palais de Mahmoud de Ghazni ont été squattés. Pour former des professionnels afghans,  la DAFA dispose d'un quota de bourses linguistiques ; des cours de français ont été mis en place à l'intention des étudiants en archéologie.


TABLEAU 33 - La présence archéologique française à Bâmiyân ( intervention de Zemaryalaï Tarzi, Directeur de la Mission archéologique française de Bâmyân )


La Délégation archéologique française en Afghanistan ( DAFA ) a pu présenter au monde le remarquable patrimoine artistique et archéologique de la paisible vallée de Bâmyân. Grâce à Mahmoud Tarzi, Premier ministre et beau-père du roi Amânullâh Khân, et à Alfred Foucher, un grand orientaliste, une convention fut signée  le 9 septembre 1922,  qui fit date dans les relations diplomatiques, culturelles et scientifiques franco-afghanes.

Alfred Foucher arriva en plein hiver à Bâmyân. Il décrit dans son rapport : "selon toute vraisemblance, c'est la dévotion des gros marchands de passage, désireux d'intéresser les "esprits" au succès de leurs affaires, qui avaient fourni l'argent nécessaire à l'organisation sinon à la construction des couvents et à l'exécution des grandes images dont s'enorgueillissait la vallée" Pourquoi ? "La raison décisive que nous cherchons nous est fournie par une particularité topographique locale : la présence de falaises éminemment propices à ce genre de travail."


La construction des grands Bouddahs se fit au VI ème siècle après J.-C. On peut raisonnablement penser que Bâmyân avait en dehors de l'agriculture et des pâturages d'autres ressources pour que sa cité devenue grandement opulente puisse ordonner la taille de 12 000 grottes, la plupart peintes et ornées de sculptures  … Il faut penser à la présence permanente d'un très grand centre artistique composé de peintres, de modeleurs et d'orfèvres.

André Godard, missionné par l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres pour effectuer des fouilles à Bactres, décrit dans son journal : "Le spectacle est magnifique. L'air frais et pur est délicieux à respirer. La vallée rouge aux falaises à pic sur la rivière brillante ne ressemble à rien de ce que nous avons vu encore de notre vie … C'est la plus belle impression que nous avons eue jusqu'à présent de l'Afghanistan."

Le couple Godard se met au travail, Madame Godard est artiste peintre. La description des ruines de la capitale musulmane au lieu-dit actuel Tepe Almas est importante dans la mesure où ces ruines sont maintenant urbanisées ou transformées en champs cultivés.


Joseph Hackin fait deux missions en 1924 et en 1930, en s'intéressant aux grottes peintes, dont trois très intéressantes. D'autres fouilles sont entreprises en 1965 et 1972. Enfin ( 2002 - 2012 ), juste après l'assassinat d'Ahmad Châh Massoud que Zémaryalaï Tarzi est nommé directeur de la mission archéologique française pour la prospection des fouilles de Bâmyân. En raison de l'insécurité, il est obligé de quitter rapidement les fouilles en ruines. En 2003, reprise des recherches scientifiques dans des conditions acceptables conduisent à d'importantes découvertes. C'est la première mission archéologique à avoir initié l'identification des ruines des monastères, mis à la disposition des visiteurs comme un musée en plein air. Enfin, ces fouilles ont constitué un terrain favorable à une bonne coopération scientifique et culturelle entre la France et l'Afghanistan.

Mais cette mission n'aurait pas réussi dans sa tâche et ses obligations sans la bienveillance de Madame Sarabi, gouverneur de Bâmyân.



TABLEAU 34 - Le musée Guimet et l'Afghanistan ( intervention de Pierre Cambon, Conservateur en chef, Musée national des arts asiatiques - Guimet )

L'exposition de 2002 a été en quelque sorte une exposition engagée politiquement au sens noble du terme, dans le sillage de la Fondation catalane La Caixa de Barcelone.

A l'hiver 2003, quand le Président Karzaï annonce à la radio que le Trésor de Tillia Tepe, qu'on croyait disparu, avait survécu dans les réserves de la Banque nationale, le musée de Kaboul souhaite une présence française pour en faire l'inventaire. Le musée Guimet fait une proposition concrète d'exposition de ce Trésor. Cette proposition ne fait pas que des heureux, mais c'est grâce à l'implication directe du Président Karzaï et au soutien sans faille du Président Chirac que le projet se réalise et prend même une dimension internationale.




Ce projet aura permis de souligner l'importance de la culture et de l'éducation, ce qu'avait pressenti en son temps le roi Amânullâh.


TABLEAU 35 - le Théâtre Aftâb ( intervention de Shohra Sabaghy et de Omid Rawendah, comédiens au Théâtre Aftâb )

Douze hommes et deux femmes créent en 2005 le Théâtre Aftâb ( aftâb = soleil ). Et pourquoi pas jouer Roméo et Juliette, Tartuffe, puis huit autres spectacles.

En 2009, première création collective racontant l'histoire de l'Afghanistan. En 2010 : Œdipe tyran de Sophocle.

Leur espoir, leur rêve est de rentrer dans un Afghanistan sécurisé et libéré pour y jouer, organiser des ateliers pour enfants, donner des cours à l'Université des Beaux-Arts de Kaboul, et créer un vrai public. En attendant, ils sont heureux d'avoir la France pour amie, parce que c'est vital pour eux.



TABLEAU 36 - Le traité d'amitié et de coopération ( interventions de Véronique Roger-Lacan, Sous-directrice d'Asie méridionale et chef de l'équipe interministérielle pour l'Afghanistan et le Pakistan, ministère des Affaires étrangères et européennes - et de Son Excellence Assad Omer, Ambassadeur de la République Islamique d'Afghanistan en France )

Ce traité a été proposé par le Président Sarkozy lors de son déplacement à Kaboul en 2011. Signé en janvier 2012, il marque l'évolution du soutien de la France à l'Afghanistan d'une dominante militaire à une dominante civile. Il s'agit du premier traité de l'Afghanistan en dehors de sa région, comme l'a souligné le Président Karzaï. Il établit un lien entre l'avant et l'après 2014. Il est complété par un programme de coopération quinquennal. Par souci de réciprocité, le traité comprend des engagements pris par l'Afghanistan envers la France dans la lutte antiterrorisme et antidrogue. Le traité fixe un cadre général pour des relations encore plus étroites et confiantes entre nos deux pays dans les années à venir.



Le rappel des relations franco-afghanes est fait par son Excellence Assad Omer :
- Premier accord en 1922 entre le Président Raymond Poincaré et le Général Wah Khân.
- Accord de coopération économique et technique en 1959.
- Clause de la nation la plus favorisée en 1966.
- Accord de coopération culturelle et économique en 1966 : Défense et sécurité, Technique et culturel, Economique et investissement.

Huit grands domaines sont couverts par l'actuel traité d'amitié et de coopération. Ils peuvent être regroupés en trois axes :
- Coopération en matière de défense et de sécurité ;
- Coopération technique et culturelle : agriculture, santé, éducation, culture et archéologie, gouvernance démocratique ;
- Relations économiques et investissements : infrastructure, commerce et industrie.


CONCLUSION



 
- Par Etienne Gille : à l'occasion de ce colloque, des constantes sont apparues : "envoyez-nous des professeurs, construisez-nous un lycée". Les milliers d'élèves qui se pressent dans chaque lycée montrent que l'enseignement peut conduire à des évolutions très importantes dans un avenir proche. Ce n'est donc pas l'heure de baisser les bras.
- Par son Excellence Assad Omer : La France a un rôle capital à jouer en tant qu'ancien pays ami et partenaire. L'Afghanistan attend de la France qu'elle persévère dans son partenariat multiforme.
- Par Pierre Lafrance : J' ajoute que l'Afghanistan est au bout du monde, mais quand on s'y trouve, on s'aperçoit qu'il en est le centre.
- Par Vera Marigo, Présidente du CEREDAF, organisateur du colloque : Quand nous avions envisagé d'organiser un colloque sur un aussi vaste sujet, nous n'avions pas mesuré son ampleur. C' est avec beaucoup d'émotion, qu'après deux journées riches et denses d'informations de discussions et de rencontres ce colloque s'achève.



Et voilà ! Le colloque s'est achevé, mais pas l'affaire afghane, qui est le baromètre de la paix dans le monde musulman. Si les Tâlebân acceptent de concilier tradition et modernité, tout devient possible. Sinon, tout risque de devenir impossible. Ami lecteur, merci de faire diffuser cette série d'articles autour de vous, en espérant pouvoir aller un jour admirer ces magnifiques paysages dans un Afghanistan en paix.