Une pierre dans mon jardin ? Que nenni !
Mais pour les Chinois lettrés, c'est le contraire : un jardin sans pierre est comme un soleil sans rayons. Mais pas n'importe quelle pierre. Il faut qu'elle provienne de Taihu, à 80 km de Shanghaï. Son choix doit répondre à 4 critères :
- la forme. Elle doit être mince, jolie,
- les gros trous : elle doit comporter si possible plusieurs gros trous.
- les petits trous, qui sont symbole de vie,
- la largeur qui fait penser à des rides.
Et bien entendu, la pierre ne doit pas avoir été transformée par l'homme.
Lors d'un mariage dans un milieu lettré et riche, la famille de la fiancée offre une telle pierre, symbole de force, à la famille du fiancé. Le paysage idéal, c'est la montagne et le lac, représentés par la pierre et le bassin. Cette dualité est naturelle en Chine : le yin et le yang, c'est aussi la lune et le soleil, la femme et l'homme, l'eau et la pierre...
Il faut savoir sentir l'eau et la pierre "bouger", et alors on devine l'âme du jardin.tisfaction" ...
Faut-il aller en Chine pour admirer un jardin chinois ? Certes, mais il y a beaucoup plus simple. Il suffit d'aller à Saint Rémy l'Honoré, à 40 km de Paris, dans la direction de Rambouillet. On y trouve le jardin Yili, véritable réplique du vrai jardin chinois, pas un parc d'attraction commercial.
Yi signifie agréable.
Li veut tout aussi bien dire parisienne, ou populaire, ou soleil du matin.
Yili, prénom de la fille de Madame Fang Shi, est donc l'agréable soleil du matin.
Lorsque Madame Fang Shi, universitaire, et son mari Monsieur Kang, maître bonzaïste de l'Université de Pékin sont venus en France, la Commune de Changzhou, dont est originaire Madame Fang Shi, a offert à la "Communauté française" en signe de mariage de la Chine et de la France plusieurs grandes pierres pesant jusqu'à 5 tonnes, posées avec le plus grand soin parmi les bassins, les kiosques, les pivoines et les bonzaïs.
Il faut donc parler des kiosques :
Dans une famille de lettrés, l'éducation des enfants se fait aussi dans le jardin. Pour cela il faut:
- un kiosque pour les jeux d'échecs ;
- un kiosque pour la calligraphie ;
- un kiosque pour la musique traditionnelle ;
- un kiosque pour la peinture.
Si les pierres et les kiosques sont visibles toute l'année, les pivoines ne fleurissent que début mai. Et il y en a partout dans le jardin Yili. Les pivoines sont une spécialité chinoise, et ont plus de 3000 ans d'existence ; elles sont connues pour leur somptuosité. Leurs racines ont servi de médicament. Le poète Li Pai, qui vivait pendant la dynastie Tang (il y a 1000 ans), a écrit un poème célébrant la pivoine qui procure richesse et honneur, symbole de la couleur du pays, au parfum de paradis.
Attention, s'il vous plaisait de faire votre jardin chinois, pas de roses ni de tulipes, ce n'est pas chinois ; mais vous pouvez y mettre des bambous. Cette plante a toutes les qualités : elle est verte pendant les quatre saisons, elle n'a pas de maladie, son tronc est propre, elle pousse à une vitesse étonnante, elle est droite et honnête. Son intérieur est creux, signe en Chine de haute moralité. On dit aussi qu'on peut vivre sans viande, mais pas dans un endroit sans bambous. Enfin, lorsque vous voudrez ravaler votre maison, les bambous vous serviront d'échafaudage.
Si vous n'avez pas assez de place pour mettre sur votre balcon pierres et bassin, vous vous rabattrez sur les bonzaïs. Le jardin Yili possède la plus grande collection de bonzaïs (10 000 ?) à emporter - et à offrir - avec leurs pots rectangulaires absolument typiques.
La Chine est aussi le pays des prunus, à floraison hâtive, même sous la neige. Le prunus symbolise le courage, la force.
Le jardin Yili se découvre auparavant sur internet
www.jardinyili.com
Ensuite il se visite à pied, toujours avec étonnement. L'âme de la Chine est toute proche de Paris. Et vous aimerez repartir avec une poterie chinoise, ou un bonzaï.
