HISTOIRE D'UNE PAIX MANQUÉE 1


 

 Création le 20 août 2023

Jean Roger (en mai 1949, il est autorisé à porter officiellement son pseudonyme de résistant : Sainteny) étudie à Paris, aux lycées Condorcet et Janson-de-Sailly. Il intègre la banque de l’Indochine qui l’envoie en Indochine française en 1929. Il rentre en France en 1932 pour fonder une affaire d'assurances-conseil.

Pendant la seconde guerre mondiale,  « Dragon » (nom de code qui lui est attribué) devient peu après le responsable de la Normandie au complet. Arrêté une nouvelle fois en septembre 1943, il s'échappe et passe dans la clandestinité, sous le nom de Sainteny.

En 1946, il est commissaire de la République pour le Tonkin et l'Annam du Nord et négocie avec Hồ Chí Minh. Il est d'ailleurs à l'origine d'un accord avec le dirigeant Việt Minh pour que l'Indochine demeure dans l'Union française : l'accord Hô-Sainteny, qui devient caduc avec l'éclatement de la guerre d'Indochine. Dès lors, les partisans de la négociation étant devenus minoritaires, Sainteny ne joue plus qu'un rôle secondaire sur le théâtre indochinois. Il est par ailleurs blessé dans une embuscade. Après les accords de Genève de 1954, il retourne à Hanoï comme délégué du gouvernement français auprès du Nord Viêt Nam.
Son livre « Histoire d’une paix manquée » raconte dans quelle mesure deux guerres auraient pu être évitées : celle d’Indochine et cette du Viet-Nam.


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Après une défaite sanglante de l’armée française contre les Japonais, le gouvernement français n’a plus d’autre choix que d’envoyer une mission d’information et de contact auprès des alliés en Chine, à Kun-Ming, en Chine méridionale, dans le Yunnan. Cette « Mission 5 » se trouve dans le centre nerveux de la lutte en Extrême Orient : les Britanniques y entretiennent une mission militaire, les Annamites, des agitateurs, les Japonais des espions. La mission militaire française a pour première tâche de maintenir un contact discret entre les camarades français restés en Indochine et la France Libre.

 

À Kun-Ming arrivent chaque jour des avions américains chargés de blessés ou de malades français recueillis à la frontière, dans un état indescriptible. Les opérations aériennes américaines se font au compte-goutte en raison de l’implacable crachin tonkinois. Mais le gouvernement américain n’y est pas favorable, et finit par refuser toute aide aux troupes françaises encore en état de combattre.
Le gros de l’armée franco-indochinoise était stationnée au Tonkin, et comptait environ 38 000 hommes, dont 7500 Européens. Les Japonais ont attaqué le 9 mars 1945, et le Tonkin a été entièrement conquis le 1er avril, à part des opérations locales en baie d’Along.
 

Sainteny fait un voyage à Paris en juillet pour exposer les possibilités d’action de la France en Indochine, mais beaucoup trop de Français s’imaginent que les Indochinois attendent notre retour avec impatience, et le problème indochinois est placé assez loin dans les soucis de la métropole. Sainteny n’arrive même pas à voir le général de Gaulle, en voyage en Bretagne, et les Alliés ont décidé de diviser l’Indochine en deux parties, dont le nord sera attribué à la Chine. Sainteny essaie en vain d’attirer l’attention sur les dangers de cette situation. C’est un échec.

PREMIER CONTACT AVEC LES NATIONALISTES
Immédiatement après son retour, Sainteny prend contact en Chine avec un leader nationaliste vietnamien, Nguyen Tuong Tam, qui souhaite que l’indépendance de l’Indochine se fasse sans effusion de sang. Des divers entretiens, il en résulte que les nationaliste indochinois seraient prêts à coopérer avec l’armée française, à condition que la France leur fournisse de l’armement et des instructeurs français … Ho Chi Minh accepterait de venir à Kun-Ming. Sainteny apprendra plus tard que les dirigeants de la « Viet-Minh League » avaient fait préparer drapeaux tricolores et banderoles de bienvenue au représentant de la France.

LE TONKIN SOUS LA MARÉE CHINOISE
Le 7 août 1945, Hiroshima est pulvérisé par une première bombe mystérieuse, la bombe atomique, et le Japon demande aussitôt un armistice. Mais les armées japonaises n’ont jamais été défaites et continuent à se battre. Sainteny projette de sauter en parachute sur Hanoï, mais Américains et Chinois y sont hostiles. Finalement, les Américains proposent un avion ; Sainteny et son groupe l’utilisent pour aller atterrir à côté de Hanoï, où les attend l’armée japonaise, qui les accompagne jusqu’au centre ville, où ils rencontrent les Français, barricadés dans leurs demeures, tandis que d’immenses calicots, barrant les avenues, proclament « À bas le colonialisme français » en anglais et chinois. Les gardes japonaises veillent à ce qu’aucun contact n’ait lieu avec les Français de Hanoï. Sainteny fait connaissance avec les leaders du nouveau gouvernement annamite, tel Vo Nguyen-Giap, ministre de l’intérieur.
 

Le 2 septembre, plusieurs centaines de milliers de manifestants célèbrent la fête de l’indépendance. Un tract abondamment répandu traite les Français de vaincus, et leur demande de se comporter comme tels. De son côté Sainteny rédige notes sur notes, réclamant la protection des civils français et la libération des militaires.

Sainteny et le général Leclerc